Rédigé par alainbarresfr@sfr.fr et publié depuis
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Ce tableau est l’un des plus dramatiques et des plus poignants de Caravage. Il porte un message
universel qui dépasse de beaucoup les péripéties de son histoire personnelle. Il nous parle de la violence que porte en lui chaque êtrehumain
et d’abord de la violence que Caravage porte en lui-même. Caravage est orgueilleux et il fait tout pour avoir le droit de porter l’épée comme les nobles. Il la porte même quand il n’en a pas le
droit. Il l’utilise à la manière des nobles pour défendre son honneur. Il se bat pour des prétextes futiles parfois, blesse les autres, est blessé, jusqu’au duel fatidique où
il tue son adversaire. A partir de 1597 (le sacrifice d’Isaac), les tableaux qui comportent des scènes violentes, en particulier des « décollations » s’accumulent. Il
est vrai que la bible regorge de ce genre de scènes et qu’elles suscitent des émotions fortes chez les spectateurs, capables de les mobiliser pour la « bonne cause »
de la religion !
Cela peut nous paraître barbare, mais en réalité,aujourd’hui, les artistes
modernes utilisent le même procédé. On necompte plusles filmsqui cherchent à scotcher les spectateurs sur leur chaise en
montrant, dès les premières images, desscènes de meurtre toutes plus horribles les unes que les autres pourla bonne cause de l’audimat !Il
faut préciserégalement qu’à l’époque de Caravage,la mort est un spectacleet lesexécutions publiquespar la
hache ou par le feune sont pas rares ! (Il est probable que Caravage ait assisté à l’exécution du savant Giordano Bruno sur le bûcher). Enfin,après 1606, et en
particulier lors de sa fuite dans le sud de l’Italie, Caravage a dû se plier au goût de ses commanditairesqui étaient souvent de culture espagnole et pour qui cette représentation de
la mort était souvent recherchée.
J'ai fait une reconstitution de ce tableau :
Caravage cède donc à la représentation de la violence dans ses tableaux.
Il semble nous direqu’elle n’existe pas que chez les
« méchants ».Elle habite également chez lesgens ordinaires, en
chacun de nous. C’est pour cela aussi queles bourreaux ne sont pascaricaturés comme des gens haineux.
C’est pourquoi également, Judith qui tranche la tête d’Holopherne,
exprime le dégoût de songeste.
…Et c’est pourquoi également le jeune berger David qui vient de triompher de l’orgueilleux Goliath
n’est pas empli de joie par sa victoire mais empli de doute et de compassion. Il semble dire : « J’ai
tué le violent mais je n’ai pas tué la violence ni en lui ni en moi ! »