14 Mars 2010
A l’heure de l’internet triomphant , des librairies en ligne qui vous proposent des centaines de milliers de titres neufs et
d’occasion, des grandes surfaces qui alignent des dizaines de milliers d’ouvrages, il est plutôt réconfortant de voir que certaines personnes n’hésitent pas à se lancer dans la création d’une
nouvelle librairie.
Depuis un an environ, la librairie « Les vents m’ont dit » s’est installée sur le quai l’Herminier à Pornic.
Le local est petit mais cela n'empêche pas cette librairie d’avoir tout d'une grande : littérature
française et étrangère, jeunesse, art, sciences humaines, BD, polar,….
A titre d’exemple, j’y ai trouvé la superbe édition des Essais de MONTAIGNE traduits en
français moderne par André LANLY (Quarto Gallimard, 1372 pages, 29,50€). Ainsi « Je veux qu'on agisse, et qu'on allonge les offices de la
vie, tant qu'on peut : et que la mort me treuve plantant mes choux, mais nonchallant d'elle, et encore plus de mon jardin imparfait. »
devient : «Je veux qu’on allonge les tâches de la vie autant qu’on peut, et que la mort me trouve en train de planter mes choux, mais
insoucieux d’elle et encore plus de mon jardin inachevé » et « La lecture me sert specialement à esveiller par divers objects mon discours : à embesongner mon jugement, non ma
memoyre. » devient : « La lecture me sert
spécialement à éveiller ma réflexion en lui fournissant divers sujets, à faire travailler mon jugement et non ma mémoire. » L’une et l’autre façon se complètent et ne s’excluent pas. Le français moderne rend
Montaigne plus familier et la langue originale replace l'auteur dans son contexte.
Un autre ouvrage intéressant : « Petite histoire des colonies
françaises » de Grégory JARRY et Otto T., une BD ironique et partisane sur la colonisation qui m’a donné l’envie d’approfondir le sujet avec 3
autres ouvrages.
A l’étage, en mezzanine, des livres encore, mais surtout une petite salle d’exposition, intime et receuillie.
Quand vous passerez par là, n’hésitez donc pas à rendre visite à la librairie « Les
vents m’ont dit », sans oublier, comme le dit Montaigne, que « Les livres ont beaucoup de qualitez aggreables à ceux qui les sçavent choisir : Mais aucun bien sans peine : C'est un plaisir qui
n'est pas net et pur, non plus que les autres : il a ses incommoditez, et bien poisantes : L'ame s'y exerce, mais le corps, duquel je n'ay non plus oublié le soing, demeure ce pendant
sans action, s'atterre et s'attriste. Je ne sçache excez plus dommageable pour moy, ny plus à eviter, en cette declinaison d'aage. » soit, en
français moderne « Les livres ont beaucoup de qualités agréables pour ceux qui savent les choisir ; mais ils n’apportent aucun bien sans peine : c’est un plaisir qui n’est pas net et
pur, pas plus que les autres ; il a ses inconvénients et bien pesants ; l’esprit s’y exerce, mais le corps, dont je n’ai pas non plus oublié le soin, demeure pendant ce temps sans
action, s’affaisse et s’attriste. Je ne sache pas excès plus dommageable pour moi ni qui soit plus à éviter dans ce déclin de la vie. » ça tombe bien !.... juste à côté commence le chemin de Gourmalon qui longe la côte jusqu’à la Thalasso, puis se
prolonge jusqu’aux Moutiers, 10 Km plus loin, par un merveilleux sentier des douaniers ! Sentiers des douaniers dites-vous ?….et
contrebandiers, aurait sans doute ajouté Montaigne ! Car sans contrebandiers qui passaient sel, vin, tabac, indiennes en fraude, pas de
douaniers, donc pas de sentiers, mais des maisons qui borderaient tout le littoral. Ouf ! Nous l’avons échappé belle !...