Les grumes pèsent plusieurs tonnes. Elles sont répertoriées par un code qui permet de s’assurer de leur provenance et autorise un suivi. Monsieur Brumachon jette rapidement un coup d’œil sur l’ensemble. Léa s’attend à ce qu’il examine minutieusement la marchandise, observe les pièces une à une, repérant le moindre défaut, négociant des rabais comme d’habitude… Mais il la prend à part et lui explique :
- Léa, nous avons déjà fait ce travail ensemble à plusieurs reprises, vous savez ce qu’il faut faire… Je dois m’absenter, j’ai une réunion politique importante. Nous sommes en pré-campagne et nous allons décider des candidatures. Je ne peux absolument pas manquer cette réunion. Je vous confie cette mission, vous allez faire la réception du lot. Vous me ferez un rapport détaillé et j’en reparlerai avec Monsieur Auffret.
Léa est estomaquée. Jamais, jusqu’à ce jour, son directeur n’avait agi de la sorte, confier cette tâche qu’il estime essentielle, à quelqu’un d’autre ! Elle n’a pas le temps de protester, il la laisse seule et entraîne le commissaire avec lui vers les bâtiments administratifs.
Il pleut de plus belle. Un instant, Léa se demande si son directeur ne lui a pas joué ce mauvais tour exprès pour échapper à la pluie ?... Elle lui en veut
même un peu. Ses petites chaussures de ville sont trempées et elle a froid aux pieds… De mauvaise humeur, elle reprend sa liste et commence à pointer chaque élément, signalant les défauts éventuels, fissures, éclatements, et toute anomalie. Elle est seule sur cet immense chantier, sous ce ciel plombé, la pluie tombe toujours, … il est neuf heures du matin… la journée commence mal ! On entend dans le lointain, le bourdonnement de la circulation, sur la quatre voies qui mène au carrefour de la Bouvre et à l’embranchement du pont de Cheviré. Depuis quelques minutes, le bruit est devenu plus insistant et plus régulier. Elle lève la tête. Le trafic, sur le pont, est complètement bloqué … pas une voiture ni un camion ne bouge. Il va y avoir du stress dans les bureaux ce matin se dit-elle ! Et tout en réfléchissant à cela, elle se félicite de ne pas avoir à emprunter, tous les matins, ce fichu pont et ses bouchons célèbres dans toute l’agglomération ! Elle plaint tous ces pauvres gens, coincés dans leur voiture qui vont arriver en retard à leur rendez-vous, au travail, à l’école… Puis elle se ravise : « Après tout, ils ne sont pas plus à plaindre que moi, eux, au moins, ils sont à l’abri », se dit-elle !
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lasidonie 06/12/2006 14:22